LEBRETON Olivier

Titre : Modes de catégorisation, contexte culturel et stratégies de résolution de problèmes arithmétiques additifs à plusieurs étapes  par les élèves de CM1 à la Réunion : impact des situations et des différents types de questionnement

Nos travaux concernent principalement les problèmes arithmétiques additifs à plusieurs étapes  isomorphes à l’énoncé suivant : Monsieur LEBON possède un immense verger. Il y a quelques années, il a planté 242 manguiers et 237 avocatiers. Malheureusement pour lui, l’année dernière un cyclone est passé tout près de la Réunion. Les vents violents ont arraché 120 manguiers et 113 cocotiers. Les autres arbres ont bien résisté aux vents. Combien d’arbres sont toujours debout dans le verger de monsieur LEBON après le passage du cyclone ?

L’étude de la compréhension et de la résolution des problèmes arithmétiques est envisagée dans le cadre général de la compréhension de textes et le modèle de Construction-Intégration de Kintsch (1988, 1998, 1993), dirigé par les données, semble particulièrement pertinent car il se veut flexible et sensible au contexte. Au delà de ces deux étapes (Construction et Intégration), Kintsch retient deux niveaux de représentation : la base de texte (niveau sémantique) et le modèle de situation (niveau situationnel) correspondant respectivement à une traduction du texte sous la forme d’un réseau propositionnel hiérarchisé et une structure  enrichie et complétée à partir des connaissances et des expériences du lecteur.

La catégorisation peut s’avérer essentielle dans l’élaboration du réseau propositionnel hiérarchisé puisqu’il permet de réduire l’information en remplaçant plusieurs concepts du niveau de base par un seul concept sur-ordonné : les manguiers et les avocatiers sont tous des arbres. Lautrey et Caroff (1990, 1999)  envisagent un modèle pluraliste du développement cognitif et leur hypothèse fondamentale réside dans le fait qu’à une même étape du développement tout sujet dispose d’une pluralité de processus susceptibles d’être mis en œuvre pour remplir une même fonction. Chacun de ces processus étant associé à une certaine probabilité d’évocation déterminant une hiérarchie d’évocabilité qui diffère selon les situations et les individus.

À la Réunion, les travaux menés par Parmentier et Hamon (2002) relativement à la catégorisation sont fondamentaux et confortent le modèle pluraliste de Lautrey. L’originalité de cette étude est qu’elle met en évidence de pondérations différentes de ces modes de catégorisation en lien avec le contexte d’enculturation.

Deux expérimentations ont été mises en place et les résultats de la première étude (Lebreton, 2012) suggèrent l’importance du rôle du processus de catégorisation dans le processus général de la compréhension des problèmes arithmétiques à plusieurs étapes et montrent que le choix stratégique privilégié par les élèves change selon la situation évoquée dans les énoncés.

Les résultats d’une deuxième étude (non publiée) mettent en évidence, que les deux types de questionnement (non prise ne compte du concept sur-ordonné / prise en compte du concept sur-ordonné) sont associés à des scores, en moyenne, significativement différents. Dans le premier cas, la compréhension est facilitée alors que dans le second, elle est entravée.

 Dans le contexte culturel singulier dans lequel se trouvent les enfants de la Réunion, considérer le développement cognitif selon un modèle pluraliste (Lautrey & Caroff) permettrait d’analyser les différences entre sujets de façon plus qualitative et non plus les considérer seulement sous l’angle d’un retard par rapport à une norme. Des études comparatives doivent être maintenant envisagées.

Bibliographie 

  • BLANC, N. & BROUILLET, D. (2003). Mémoire et compréhension : Lire pour comprendre. In Press Editions.
  • COQUIN-VIENNOT, D. (2001/2). Problèmes arithmétiques verbaux à l’école : pourquoi les élèves de répondent-ils pas à la question posée ?, Enfance, 53, 181-196.
  • FAYOL, M. & ABDI, H. (1986). Impact des formulations sur la résolution de problèmes additifs chez l’enfant de 6 à 10 ans, European Journal of Psychology of Education, Vol I, 41-58.
  • KINTSCH, W. (1988). The role of knowledge in discourse comprehension : a Construction-Integration model, Psychological Review, 95(2), 163-182.
  • KINTSCH, W. & GREENO, J. (1985). Understanding and solving word arithmetic problems, Psychological Review, 92(1), 109-129.
  • KINTSCH, W. & LEWIS, A-B. (1993). The time course of hypothesis formation in solving arithmetic word problems. In M. Denis & G. Sabah (Eds.), Modèles et conceots pour la science cognitive : Hommage à Jean-François Le Ny, (pp. 11-23). Grenoble : Presses Universitaires.
  • LEBRETON, O. (2012). Compréhension des énoncés de problèmes arithmétiques complexes et catégorisation, Kabaro, 41-53.
  • RILEY, M. GREENO, J. & HELLER, J. (1983). Development of word problem solving ability. In, H. P. Ginsburg (Ed.), Development of mathematical thinking, (pp. 153-196). New York : Academic Press.
  • ROSSI, J. P. (2008). ­Psychologie de la compréhension du langage. Bruxelles, De Boeck Université.
  • THEVENOT, C. BARROUILLET, T. & FAYOL, M. (2004). Représentation mentale et procédures de résolution de problèmes arithmétiques : l’effet du placement de la question. L’année Psychologique, 104, 683-699.
  • THEVENOT, C. & OAKHILL, J. (2006). Representation ans strategies for solving dynamic and static arithmetic word problems : The role of working memory capacities. European Journal of Cognitive Psychology, 18(5), 756-775.

Biographie

Professeur des écoles depuis 2000. Obtention du doctorat de 3ème cycle à l’Université de la Réunion en 2011 (spécialité : psychologie cognitive). Les travaux menés concernent la compréhension et la résolution de problèmes arithmétiques complexes par les élèves de l’école élémentaire.

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