Selon son moment ou sa finalité, le type d’évaluation varie. En effet, il n’y a pas une mais des évaluations : diagnostique, formative, sommative, certificative…Toutes sont plus ou moins utilisées par l’enseignant, l’élève ou l’institution selon qui évalue, et chaque élève connaît au cours de sa scolarité différentes formes d’évaluation.
Olivier Rey, responsable du service Veille & Analyses de l’Institut français de l’éducation (IFE) à l’ENS de Lyon, spécialisé sur les questions d’évaluation, distingue deux grands types d’évaluation à l’école : « l’évaluation des apprentissages, que l’on peut appeler « sommative », qui vise à mesurer où en sont les élèves par rapport à un objectif fixé. Elle mesure l’écart entre l’élève et la cible. Puis, il y a l’évaluation pourles apprentissages, « formative », qui ne sert pas à mesurer un niveau par rapport à un objectif mais où en est l’élève sur le parcours qui consiste à s’approprier des connaissances et des compétences. Là, on ne fige pas une situation, ça ne clôt pas un processus : elle sert à continuer à progresser. C’est un repère et non une phase finale. » Alors que l’évaluation sommative arrive en fin de processus d’apprentissage, et permet de répondre à la question « L’élève a-t-il atteint l’objectif ? », alors que l’évaluation formative intervient en cours d’apprentissage et permet de répondre à « L’élève est-il en voie d’atteindre l’objectif ? ». « L’évaluation sommative sert à valider institutionnellement des compétences, explique Charles Hadji, professeur émérite en sciences de l’éducation et spécialiste de la question de l’évaluation. L’évaluation formative sert à faciliter les apprentissages, à aider les élèves, en permettant par exemple d’obtenir des informations sur ce qu’ils savent et surtout ne savent pas. L’évaluation est ici informative. »
Ces deux types d’évaluations n’ont donc pas lieu au même moment de l’apprentissage, et n’ont également pas la même finalité. L’évaluation formative est surtout utile à l’enseignant et à l’élève. Grâce à cette évaluation, l’enseignant pourra adapter la suite de son enseignement pour atteindre l’objectif final selon les difficultés qu’il a vu apparaître chez les élèves. L’élève, quant à lui, aura pointé ses acquis et ses difficultés. Il saura alors sur quels points son attention doit se porter pour atteindre l’objectif final de l’apprentissage. Ce type d’évaluation serait d’ailleurs la principale fonction de l’évaluation selon les enseignants. En effet, la synthèse de la consultation pour le nouveau socle commun, publiée en décembre 2014, note que « plus de neuf personnes (du personnel éducatif) interrogés sur dix s’accordent à dire que l‘évaluation consiste à indiquer où en sont les élèves dans leurs apprentissages pour que l’enseignant puisse organiser son enseignement ». Concrètement, l’évaluation formative peut prendre la forme de questions posées aux élèves au cours d’une séance ou de petits exercices comme un QCM à l’issue d’une séance de cours. Elle peut aussi permettre l’auto-évaluation. L’évaluation sommative, en revanche, a une portée plus large : elle renseigne l’élève et l’enseignant, mais aussi l’institution et la famille. En effet, cette évaluation sert à communiquer à l’élève, à l’enseignant et l’institution le niveau atteint par l’élève, mais également aux familles car elle figurera, notamment, dans le bulletin scolaire. Mais si la communication s’avère plus large au niveau des interlocuteurs, elle l’est moins au niveau des informations : dans la pratique, l’évaluation sommative prend la plupart du temps la forme d’un « contrôle » noté (parfois avec quelques appréciations) quand l’évaluation formative – c’est son but – informe précisément des points positifs et négatifs d’un travail. Ainsi, une évaluation sommative délivre « un message insuffisant, car elle ne dit pas où il faut progresser », selon Olivier Rey. « Elle a une faible valeur informative et a un fort pouvoir de stigmatisation » confirme Charles Hadji. En effet, une évaluation sommative, si elle peut motiver l’élève (souvent les meilleurs), a également des risques de l’angoisser (souvent les moins bons élèves). Toutefois, évaluations sommatives et formatives sont souvent « entremêlées », comme le souligne Olivier Rey. Les résultats d’un « contrôle » lors d’une évaluation sommative peuvent rendre celle-ci formative : s’ils ne correspondent pas aux attentes, l’enseignant peut alors décider de revenir sur les points les moins bien acquis.
En France, la forme d’évaluation dominante est l’évaluation sommative. « Elle est apparue quand on a fait de l’éducation de masse et en même temps que les premiers diplômes, rappelle Olivier Rey. Elle s’est imposée car notre société a estimé que ce n’était pas juste qu’on distribue les places à partir de la naissance. Cela permettait de répartir de façon plus juste – du moins selon un certain principe de justice, d’élitisme républicain et de méritocratie. » Le fait que l’évaluation sommative prédomine en France par rapport à l’évaluation formative renvoie alors à une certaine vision du rôle de l’école. En effet, « l’évaluation sommative permet surtout de trier, classer, sélectionner les élèves. Cela tend à devenir l’unique raison. C’est une monomanie : éliminer les moins bons, retenir les meilleurs », indique Charles Hadji. C’est pourquoi « plus on avance dans l’âge des élèves, moins les évaluations sont formatives, car on va de plus en plus se caler sur les examens du brevet et du bac », souligne Olivier Rey. Une prédominance de ce type d’évaluation qui peut également se comprendre par le fait que « l’évaluation formative demande plus d’efforts à l’enseignant, qui doit expliquer les raisons de l’échec à l’élève, alors que, pour une évaluation sommative, la plupart du temps, on donne un devoir surveillé, on le note et on n’y revient plus et tant pis pour ceux qui sont restés sur la route », résume Olivier Rey. En revanche, l’évaluation sommative a l’avantage de permettre, par l’institution, la délivrance d’un diplôme ou l’accès à un niveau de formation supérieur, que l’on nomme dans ce cas – c’est-à-dire à la fin d’une formation, et non d’une séquence d’apprentissage – l’évaluation certificative.
D’autres formes d’évaluation existent également. Intervenant avant le processus d’apprentissage, l’évaluation diagnostique (ou pronostique) permet de situer l’élève dans ses apprentissages. Celui-ci saura alors identifier ses lacunes avant même la phase d’apprentissage et l’enseignant pourra vérifier si l’élève maîtrise les bases pour, éventuellement, mettre en place un enseignement différencié. En outre, « l’évaluation diagnostique peut également intervenir à la fin d’un cycle pour orienter l’élève » explique Charles Hadji. L’évaluation normative, quant à elle, permet de situer l’élève par rapport aux autres apprenants. Elle est notamment utile pour la sélection et le recrutement, et peut permettre l’émulation et la compétition. On peut enfin indiquer l’évaluation critériée qui permet de mesurer l’écart par rapport aux compétences recherchées, à des critères précis de réussite, et non par rapport aux autres apprenants. Elle se mesure généralement avec des « acquis/non acquis ».
Source :
Article dans le cadre du dossier Evaluation du numéro 3 de La Revue de l’Education. Lire sur ce blog également l’interview de Michel Lussault, l’article Evaluation : qui, quand, pourquoi, comment ? ainsi que l‘interview de Paul Andréo.
Autre document sur l’évaluation : ici